cÙtÈ de la petite table rÈservÈe aux tÈlÈgrammes et aux recommandÈs, dans le bureau de poste romain de San Silvestro, un stand colorÈ semble annoncer le lancement d'un nouveau produit. En gros caractËres et schÈmas ý l'appui, les panneaux indiquent pourtant sans Èquivoque : ´RÈgularisation des travailleurs extra-communautai res.ª

Depuis le 28 aošt, l'Italie a donnÈ le coup d'envoi d'une vaste opÈration de rÈgularisation des immigrÈs, quatre ans aprËs la derniËre mesure qui avait permis de faire sortir plus de 250 000 personnes de la clandestinitÈ. Hier, ý San Silvestro, ils Ètaient encore quelques dizaines de candidats venus retirer, avant la date limite du 11 septembre, un ou plusieurs formulaires de demande de rÈgularisation. ´J'en ai pris qua tre, deux pour moi et mon mari, les deux autres pour des amiesª, s'excuse Sandra, une jeune Roumaine. ´Trop de travail, je n'ai pas pu venir plus tÙtª, regrette Sulpicio, un PÈruvien de 36 ans entrÈ il y a moins d'un an avec un visa touristique. L'employÈ des postes l'observe avec un petit sourire : ´En rÈalitÈ, il vaut mieux passer aujourd'hui.ª Fin aošt, le dÈmarrage du processus de rÈgularisation a provoquÈ un vÈritable assaut aux guichets des 14 000 bureaux de poste italiens. Et plus de 800 000 formulaires ont ÈtÈ jusqu'ý prÈsent distribuÈs.

Pragmatisme. Rien que dans la rÈgion du Latium (autour de Rome), 66 000 enveloppes ont ÈtÈ ainsi retirÈes au cours de la premiËre journÈe. A priori, cette premiËre vague de rÈgularisation ne concerne pourtant que le personnel de mÈnage et les aides familiales. ´J'emploie au noir une domestique philippine depuis deux ans et demi. Elle n'a pas de papiers. J'attendais une opÈration de rÈgularisation pour la dÈclarerª, explique Cris tina, conseillËre fiscale ý Rome qui, comme quelques autres employeurs, est venue ý la poste de San Silvestro pour retirer personnellement le formulaire. En principe, le permis de sÈjour Ètant liÈ au contrat de travail, ce sont en effet les employeurs qui doivent remplir le dossier. ´Je vais devoir payer environ 330 euros pour la rÈgulariser, cela me paraÓt raisonnableª, ajoute Cristina qui se fÈlicite du pragmatisme du gouvernement Berlusconi : ´On peut toujours dire que l'on va mener la lutte contre l'immigration, mais on ne va pas renvoyer chez eux les extracommunautaires qui ont un travail, et dont l'Italie a besoin. Nous savons tous qu'il y a un demi-million de femmes de mÈnage ý rÈgulariser...ª

´J'ai passÈ un accord avec un patron. Je paie les frais pour la rÈgularisation et il accepte de faire la dÈclarationª, explique Sulpicio dans un italien aux accents hispaniques. ´Je gagne entre 400 et 500 euros par mois. La rÈgularisation me coštera donc prËs d'un mois de salaire. Mais avec des papiers je pourrai trouver un autre travailª, raconte dans un sourire cet ancien fonctionnaire de la SociÈtÈ nationale des eaux pÈruviennes, licenciÈ Èconomique. ExerÁant diffÈrents petits boulots, Sulpicio s'interroge toutefois pour savoir s'il a intÈrÍt ý remplir l'enveloppe blanche rÈservÈe au personnel domestique ou, en tant que peintre en b’timent occasionnel, at ten dre le formulaire bleu rÈservÈ aux ouvriers et autres employÈs d'entreprise : pour cette seconde catÈgorie, l'opÈration de rÈgularisation ne dÈbutera que la semaine prochaine.

´Que Dieu nous aideª, l’che Sulpicio, convaincu qu'il n'encourt pas grand risque ý rÈvÈler son identitÈ et son adresse aux autoritÈs : ´Qu'est-ce qu'ils peuvent faire ? Nous expulser ? Les entreprises italiennes feraient faillite.ª

´Approche positiveª. Du cÙtÈ des associations d'aide aux immigrÈs, on affiche une certaine sÈrÈnitÈ. ´Je pense qu'au total il y aura entre 450 000 et 500 000 rÈgularisationsª, calcule Sergio Briguglio, membre du groupe de travail catholique proche de Caritas (1) qui ajoute : ´Le gouvernement Berlusconi a une approche de la question assez positive. Pour l'heure, les choses vont dans le bon sens.ª Et il conclut : ´La majoritÈ de droite avait adoptÈ [ý son arrivÈe au pouvoir] une loi sur l'immigration stupide. C'Ètait le prix ý payer auprËs de son Èlectorat aprËs une propagande anti-immigrÈs. Aujourd'hui, le gouvernement prend en compte la rÈalitÈ.ª.