Tribunal administratif de Francfort sur le Main, jugement n°7 K 560/11.F.A du 9 juillet 2013

[Traduction libre]


Le recourant est un Afghan de 24 ans. Il a passé 4 mois en Grèce avant d’entrer en Italie par bateau. Il a été admis quelques heures à l’hôpital. Des policiers sont venus et ont saisi ses empreintes digitales. Il n’y avait pas de traducteur et ils parlaient une espèce d’anglais. Il ne semble pas qu’ils aient prononcé le mot « asile ». Le recourant a passé ensuite deux jours à Rome puis un jour à Paris avant d’arriver à Francfort où il est arrêté par la police le lendemain, à la gare. Il déclare vouloir demander l’asile et ne l’avoir jamais fait auparavant. L’Italie a donné son accord à la réadmission le 25 janvier 2011 et l’autorité a ordonné le renvoi vers cet Etat, en application des accords de Dublin. Le recourant a versé un rapport médical psychiatrique à son dossier, comme quoi il souffre de stress post-traumatique. 

L’enregistrement des empreintes digitales n’est pas une preuve du dépôt d’une demande d’asile ce d’autant moins que le document du « Questura in Lecce (Otranto) », que le recourant a versé au dossier, qui ne contient pas de phrases grammaticalement correctes, se réfère à une demande d’asile déposée « d’après la directive (CE) n°2725/2000 », laquelle est relative à Eurodac. Cette directive ne règle pas les conditions dans lesquelles on dépose une demande d’asile, ni le contenu de cette demande. Une demande d’asile est déposée lorsque l’autorité a reçu une demande écrite de l’intéressé ou lorsque ses déclarations ont été protocolées. 

Même si on devait admettre que le recourant a bien déposé une demande d’asile à Otranto le 14 décembre 2010, jour de son enregistrement, cela en soi ne fonderait pas la compétence de l’Italie au sens de l’article 13 du règlement Dublin. La compétence de l’Italie n’est pas fondée au regard des articles 3 CEDH et 4 de la Charte européenne des droits fondamentaux. Il existe un risque concret que le recourant soit soumis à des mauvais traitements en cas de renvoi en Italie, ce qui impliquerait une violation de l’article 3 CEDH et de l’article 4 de la Charte, c’est-à-dire du droit primaire de l’Union, dans le chef des autorités de la République fédérale d’Allemagne. 

Ni l’un ni l’autre de ces articles ne prévoit une obligation des Etats parties d’offrir aux gens un certain standard de conditions de vie. De telles obligations d’un Etat découlent d’un système juridique positif d’assistance, national ou international, par exemple la directive 2003/9/EG du 27 janvier 2003 relatives aux normes minimales d’accueil des demandeurs d’asile. 

On notera tout d’abord que les autorités italiennes ont été conscientes que le recourant voulait demander l’asile mais qu’elles n’ont pas été en mesure de formaliser cette demande par un document approprié.

La chambre de céans se réfère à la décision de la CourEDH du 2 avril 2013, requête n°27725/10, Mohammed Hussein et autre c. Pays-Bas et Italie.

Le système de prise en charge en Italie est très insuffisant. Les autorités italiennes reconnaissent elles-mêmes ne pas avoir une vue d’ensemble sur les capacités et l’effectivité du système d’accueil, ce qu’elles ont déclaré pendant la procédure devant la Cour (§ 45). Théoriquement, le système est divisé en deux phases. La première est la prise en charge des demandeurs d’asile dans des centres d’accueil dénommés CARA. Ils sont prévus pour une période de 20 jours au cours de laquelle les intéressés sont identifiés. Si la Commission territoriale pour la mise en œuvre de la protection internationale rend sa décision sur la demande d’asile dans les 35 jours, le séjour au CARA est prolongé. Le séjour dans les CARA n’est prévu que pour les demandeurs d’asile en procédure. Il n’existe aucune autre possibilité de prise en charge. En tout, on compte 9 CARA répartis dans tout le pays. Ils sont gérés par des mandataires privés choisis par la préfecture selon une procédure d’appel écrite. Il existe encore des centres pour les migrants qui ne sont pas demandeurs d’asile, les CDA. Ils accueillent aussi des demandeurs d’asile. 

Le seconde phase commence au-delà des 35 jours. Le demandeur est pris en charge par le SPRAR, le système de protection des demandeurs d’asile et des réfugiés. Les centres sont gérés par les communes, les provinces et des organisations privées, qui reçoivent une subvention sur la base d’une procédure d’appel écrite. Il y a environ 150 centres de ce type destinés aux demandeurs d’asile, aux réfugiés statutaires et aux personnes titulaires de la protection subsidiaire. Dans aucun de ces centres, ni les CARA, ni les CDA, ni les centres gérés par le SPRAR, les intéressés ne reçoivent l’assistance à laquelle ils pourraient prétendre en application de la directive accueil. Les déterminations du gouvernement italien dans la décision de la Cour décrivent les critères d’admission dans ces centres. Le gouvernement précise que [les conditions d’accueil dans les CARA ont été améliorées] :

More generally speaking, the above mentioned tender specifications have introduced further improvements of the services provided in the centres for refugees (and in general for all government centres for migrants) enhancing the services to the persons on the one hand and strengthening the measures aimed at controlling the management as well as ex penditures on the other. (Mohammed Hussein, § 45)

En ce qui concerne les centres du SPRAR, le gouvernement déclare réfléchir à leur amélioration mais que les moyens financiers manquent pour le moment :

In this connection, the possibility of developing the SPRAR is being studied, although the necessary financial resources will have to be found.

Les autorités italiennes précisent encore qu’une prise en charge multifonctionnelle a été développée dans certaines villes comme Rome, Florence, Milan et Turin :

The reception system is completed by the Metropolitan Multifunctional Reception Centres created in 2007 in some metropolitan cities like Rome, Milan, Florence and Turin.

Donc, concrètement, les demandeurs d’asile ne peuvent être acceptés que dans des centres de premier accueil, les CARA, après s’être annoncés auprès de la section pour l’immigration de la police (Questura) (Mohammed Hussein, § 33). Selon l’OSAR, dans son rapport de mai 2011 et sa prise de position auprès du Tribunal de céans du 7 mai 2013, ainsi que la prise de position de Borderline-europe, les demandeurs d’asile, malgré le texte de la loi, ne reçoivent pas immédiatement la carte d’enregistrement (cedolino). On leur donne un rendez-vous pour l’enregistrement (verbalizzazione) parfois après des mois d’attente. Ils restent sans abris pendant tout ce temps. Pendant l’audition, ils doivent remplir un formulaire C3 et faire part de leurs motifs d’asile. La demande d’asile s’ouvre avec ce formulaire et c’est à ce moment qu’ils reçoivent la carte (cedolino) avec laquelle ils doivent rechercher une place d’accueil. Le HCR a confirmé cela dans sa prise de position du 24 avril 2012 devant le Tribunal de Braunschweig ainsi que devant la Cour.

La possession de la carte ne signifie pas encore que le demandeur trouvera effectivement une place dans un CARA. Cela ressort déjà du fait que le nombre de places dans les CARA, CDA et centres du SPRAR est très inférieur au nombre de demandeurs d’asile. 

Il ressort du rapport du Commissaire européen aux droits de l’homme, du 18 septembre 2012, qui est reproduit sur presque deux pages dans la décision de la Cour (§ 44), qu’à la fin de 2012, il y avait 3'000 places de long séjour dans les centres du SPRAR. Il y aurait encore 2'000 places en CARA et 3'000 places dans les CDA (Mohammed Hussein, § 43). Selon la position de juillet 2012 du HCR, qui est reproduite au § 43, il y a 2'000 places en CARA, 3'000 places en CDA et 3'000 places en centres SPRAR. Dans un rapport commun d’ONG rendu public le 19 décembre 2012 et cité dans la décision de la Cour sur deux pages et demi, il y a 3'747 places dans les CARA et 3'000 dans les centres du SPRAR. Le HCR parle de 5'000 places en tout (CARA et SPRAR) pour les demandeurs d’asile qui attendent une décision. Il est également rapporté qu’entre janvier et août 2012, sur les 1'148 transferts Dublin qui ont eu lieu à destination de l’Italie [et qui ont été répertoriés par une ONG qui a eu un entretien avec eux à l’aéroport], seulement 313 ont eu accès à un logement, parmi eux, 134 ne l’ont eu que pour une courte période et 88 (7,66%) dans un CARA ou un centre du SPRAR. Pendant l’année 2010, les rapports évaluent à 12,48% les personnes ayant obtenu un logement dans un centre SPRAR après un renvoi Dublin. En 2011, 5'798 personnes étaient logées par le SPRAR. A la fin de l’année, la liste d’attente comptait 7'431 personnes, et en juin 2012, 6'939 personnes. Cela signifie qu’environ une personne sur deux a accès à une place du SPRAR. Pour les systèmes communaux d’accueil, le temps d’attente est de trois à six mois. Pendant ce temps, les intéressés sont sans-abris. 

Le gouvernement italien parle de 4'102 places en CARA et 3'000 places du SPRAR. Ces chiffres sont bien en-deçà du nombre de demandeurs d’asile.

Selon les rapports cités par la Cour, il y avait 8'000 demandes d’asile pendantes à la fin de 2012 (§ 44). Borderline-europe parle de 15'000 procédures ouvertes dans le premier quart de 2012, tandis que le rapport commun d’ONG mentionne 37'350 demandes d’asile en 2011. Selon les données Eurostat, au 31 décembre 2012, on comptait 15'000 demandes d’asile pendantes en Italie. […]

Une partie des demandeurs qui ne trouvent pas de prise en charge dans les structures officielles de l’asile, se tournent vers les réseaux communaux, dans les grandes villes surtout. Le délai d’attente pour ces structures, selon Borderline-europe, est de trois à six mois. Pendant ce temps, les demandeurs sont concrètement sans abris. Une partie de sans-abris trouve un toit dans les églises ou dans des structures privées de secours qui sont prévues pour les italiens sans-abris.

Une autre partie s’est trouvé elle-même un squat ou loge dans un taudis (Slum). Il s’agit de constructions en ruine menaçant de s’effondrer ou qui n’offrent aucune sécurité sanitaire. Selon la décision de la Cour précitée, selon le rapport commun d’ONG, ces abris surgissent dans les grandes villes comme des champignons et sont caractéristiques du système d’accueil italien. La situation a été détaillée dans une recherche de Dominik Bender et Maria Bethke. […] 

En 2011, la protection civile a organisé 50'000 places d’accueil pendant le « printemps arabe » où, entre début 2011 et fin 2012 près de 65'000 migrants d’Afrique du Nord sont arrivés par bateau. A la fin de 2012, il y avait encore 22'000 demandeurs d’asile pris en charge. Les autres avaient disparu ou avaient été renvoyés. Ces centres étaient réservés à ce type de migration et ils ont été fermés à la fin de 2012. Il restait encore 18'000 personnes qui devaient être reçues par le système d’accueil officiel (Bender/Bethke, Asylmagazin 4/2013 p. 106). 

Celui qui a trouvé une place dans un CARA, n’est absolument pas certain de pouvoir y demeurer jusqu’à la fin de la procédure d’asile. Il est même connu que les demandeurs d’asile sont pris en charge pendant 6 mois au plus dans les CARA. Borderline-europe précise que de nombreuses personnes séjournent en CARA bien plus que 6 mois, tandis que d’autres sont expulsées après les 6 mois et doivent ensuite vivre dans la rue ou camper devant les CARA.

Selon le rapport commun d’ONG (Mohammed Hussein, § 49), les personnes qui n’avaient pas de place en centre pendant leur séjour antérieur en Italie, en cas de renvoi et indépendamment de la possibilité de principe d’accès à un logement, en raison du manque de places, peuvent attendre très longtemps [un accès à l’aide]. 

En outre, les conditions d’accueil dans les CARA ne correspondent pas à celles prévues par la directive accueil, comme le rapporte Borderline-europe pour les centres de Salinagrande, Trapani (Sicile) où, dans un espace de 15 m2, cinq à six personnes sont hébergées sur des matelas posés à même le sol. Dans une chambre, un tuyau coulait de sorte que les gens étaient obligés de dormir dans l’humidité. Les installations sanitaires ne fonctionnent pas. Il n’y a pas de possibilité de laver son linge ni de le ranger. Il n’y a pas d’eau chaude. Il n’y a pas de séparation des hommes, des femmes et des familles. Des gens sont dépendants de l’alcool ou se prostituent, et en raison du bruit permanent, il est pratiquement impossible de dormir. 

A propos du CARA de Mineo, il est rapporté qu’il n’y a pas d’argent de poche, seulement sous forme de distribution de cigarettes par tête, y compris les enfants et les bébés. Selon les rapports, les sanitaires sont insuffisants, l’eau est rationnée et tout est sale. Une délégation de l’UE à Mineo a relevé que la prostitution forcée et les activités criminelles sont le lot quotidien, et que l’accès aux soins médicaux est insuffisant. On a rapporté que le ministère de l’intérieur italien a décrit le CARA de Mineo comme le meilleur (fortschrittlichste) centre d’accueil pour les réfugiés en Italie. Le Commissaire européen des droits de l’homme du Conseil de l’Europe décrit quelques-uns de ces CARA comme des prisons où il manque du personnel, tant en nombre que du point de vue de leur formation, surpeuplés et dépourvus de postes pour les services spéciaux tels le conseil social ou juridique. 

Selon l’article 13 al. 1 de la directive accueil, les Etats membres doivent procurer l’aide matérielle aux demandeurs d’asile depuis le dépôt de la demande. Selon la définition de l’article 2 let. j, « les conditions d’accueil comprennent le logement, la nourriture et l’habillement, fournis en nature ou sous forme d’allocations financières ou de bons, ainsi qu’une allocation journalière. » Selon l’article 13 al. 3, les Etats membres ne peuvent subordonner l’octroi de tout ou partie des conditions matérielles d’accueil et des soins de santé qu’à la condition que les demandeurs disposent de moyens suffisants pour avoir un niveau de vie adapté à leur santé et pour pouvoir assurer leur subsistance. D’autres conditions d’octroi restrictives ne sont pas admises. Selon l’article 2 let. b, la demande d’asile est considérée comme déposée lorsque le requérant a manifesté une demande de protection internationale. 

Le fait que seule la verbalizzazione ouvre le droit des demandeurs d’asile aux mesures d’accueil et d’accès à un CARA, parce que c’est à ce moment qu’ils reçoivent la cedolino, et le fait que ceux qui n’ont pas de logement ne reçoivent pas non plus de nourriture, ni de vêtements (dont les forfaits existent sur le papiers mais ne sont pas versés, selon Borderline-europe), constituent une violation grave de la directive accueil. Il s’agit aussi d’une carence structurelle, parce que c’est ainsi que cela se passe régulièrement, et non seulement dans quelques cas, ou d’après des déclarations individuelles isolées. 

Il suit que faute d’attribution d’un logement, les demandeurs d’asile n’ont pas de domicile régulier jusqu’à la verbalizzazione. Le domicile est une condition d’octroi de la carte de santé (tessera sanitaria) , qui donne accès au système de soins de santé. L’Italie viole ainsi également l’article 15 de la directive accueil, qui stipule que l’accès aux soins doit être garanti.

Le fait que ceux qui ont obtenu un logement en soient privés par la suite avant qu’une décision sur leur demande d’asile ne soit prise, en violation des obligations matérielles en matière d’accueil de l’article 16 § 5 de la directive accueil, ou le fait que les conditions de logement soient inappropriées telles des chambres insalubres ou surpeuplées, l’octroi d’une allocation journalière sous forme de cigarettes, pas d’eau chaude, etc. sont des indices que le système d’asile en Italie présente des carences graves et systématiques, qui sont des motifs sérieux et suffisamment documentés (durch Tatsachen bestägtigt) de croire que le recourant, en cas de renvoi en Italie, court un risque concret d’être soumis à un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 4 de la Charte.

Ceci vaut d’autant plus que le recourant n’a pas été enregistré en Italie comme demandeur d’asile ce qui signifie que la procédure de verbalizzazione n’a pas encore eu lieu. Les informations insérées dans la base de données mentionnent seulement une demande d’asile (Richiesta Asilo Politico). Il est donc manifeste qu’il ne s’agit ici que d’une identification de l’intéressé et que le dépôt de la demande d’asile [nécessite encore] un rendez-vous pour remplir le formulaire C3. Même si le recourant, contrairement à ses allégations, avait manifesté aux policiers à Otranto son intention de demander l’asile, il n’a pas été pris en charge par le système d’accueil, et en cas de renvoi maintenant en Italie, il ne pourra pas compter sur une assistance conforme au droit de l’Union. (p. 17)

[…] On peut estimer que le risque d’être confronté à un mauvais traitement en cas de renvoi en Italie faute de conditions d’accueil conformes aux directives européennes concerne 50% des demandeurs d’asile. (p. 17)

[…] (p. 18 à 21)

A propos de la décision de la Cour du 2 avril 2013, elle ne doit pas être comprise autrement que selon le sens que la Cour elle-même a voulu lui donner, au § 78. Ce sens est évident si on prend tous les éléments en considération : Tout d’abord, la Cour explique que selon une jurisprudence constante, la requête doit être rejetée lorsqu’elle s’appuie délibérément sur de fausses allégations. Dans un tel cas, le recours doit être considéré comme manifestement mal fondé et donc rejeté. En l’espèce, la requête de la requérante a été déclarée irrecevable parce qu’elle était fondée sur un état de fait faux. Cette solution était guidée également par la surcharge notoire de la Cour, pour des raisons d’économie de procédure. Malgré tout, la Cour a rassemblé les différents rapports des organisations gouvernementales et non gouvernementales sur la situation des demandeurs d’asile en Italie et les a cités de manière détaillée, pratiquement mot à mot sur de nombreuses pages. La Cour a pris en compte la jurisprudence allemande, belge et britannique sur trois pages, ceci malgré les allégations contradictoires de la requérante sur sa situation. Finalement, dans la motivation de sa décision, la Cour a encore procédé à une appréciation juridique complète. Pour étonnante qu’elle soit, cette démarche doit être comprise en ce sens que la Cour prend la situation en Italie au sérieux. […] (p. 22)

[…] [résumé p. 23-25] Le Tribunal est déjà informé, à travers les nombreuses affaires dont il a à traiter, que des demandeurs d’asile transférés en Italie via le système Dublin et revenus en Allemagne, avaient vécu sans secours en Italie. Il n’y a pas de raison de mettre en doute les descriptions qu’ils ont faites de leurs conditions de vie là-bas. Dans une autre affaire récente, le Tribunal de céans a jugé que les autorités italiennes n’avaient pas manifesté la volonté d’accepter le recourant dans une procédure d’asile ni de lui offrir l’aide sociale et le logement dont il aurait besoin, eu égard à ce que le recourant lui-même a expliqué de son séjour en Italie. Dans une autre affaire, le Tribunal relate qu’à son arrivée à l’aéroport de Rome, le recourant a été interrogé sans l’assistance d’un interprète par la police des frontières. Il ne comprenait pas ce qu’on lui disait en italien et il ne pouvait rien répondre. Il a passé le reste de la journée et la nuit suivante dans le hall d’attente de la zone de transit où il a dormi par terre. Le lendemain, on lui a donné l’adresse de l’ambassade iranienne avec l’instruction d’aller y demander de l’aide. Vers midi, on lui a remis une décision disant qu’il devait quitter l’Italie dans les 7 jours. Puis on lui a signifié qu’il lui était interdit de demeurer dans les locaux de l’aéroport. Il est parti en ville. Il a tenté de s’adresser à différents agents de police mais aucun n’a pu le renseigner. Le soir, il rencontré un afghan qui lui a donné quelque chose à manger et c’est la première fois qu’il mangeait depuis son arrivée à l’aéroport de Rome. Un proche en Iran a pu lui envoyer de l’argent qui est arrivé trois jours plus tard, avec lequel il est revenu en Allemagne et a prié les autorités d’examiner sa demande d’asile. 

Selon l’article 13 du règlement (CE) n°343/2003, l’Italie est compétente pour le traitement de la demande d’asile du recourant. Selon l’article 3 § 2 de ce règlement cependant, la République fédérale d’Allemagne est tenue d’examiner cette demande dans la mesure où, eu égard à la situation en Italie telle qu’elle est établie ci-dessus, [il n’existe pas de motif juridique contraignant s’opposant au droit souverain de l’Etat d’examiner lui-même la demande d’asile].